Je suis une mère irresponsable qui laisse traîner à portée d’enfants des ouvrages destinés aux adultes. C’est ainsi que ma grande de presque dix ans est tombée raide dingue des Culottées de Pénélope Bagieu, notamment les pages du tome 2 consacrées à une criminologue autodidacte qui a révolutionné l’analyse des scènes de crime en effectuant des reconstitutions miniatures d’une exactitude scrupuleuse.
Ma fille se moque éperdument des scènes de crime mais elle est devenue obsédée à l’idée de construire elle-même des pièces minutieuses qu’elle décorerait à sa façon. Il n’est désormais plus question de la maison playmobil dont elle rêvait pour Noël. Face à une telle ferveur et insistance, comment ne pas répondre à ses désirs ? Le grand-père a dégoté dans sa cave une chute de contreplaqué, pris les mesures avec la donzelle qui s’en est rentrée à la maison avec une pièce toute nue. Je recommande cette activité pour les parents qui veulent avoir la paix : elle a passé des heures, la langue pendante, à colorier le sol à la façon d’un parquet à chevrons, avec des dégradés subtils de marron léger.
Deux ou trois couches de vernis incolore plus tard, il a fallu papiéter les murs. Comme la demoiselle a des goûts très avant-gardistes, elle a jeté son dévolu sur des morceaux de papier William Morris que je conservais jalousement depuis longtemps. Ça tombait bien, il traînait au sous-sol un fond de pot acrylique bleu dur parfaitement assorti aux papiers et, au grenier, un lot de meubles de poupée d’une laideur insoupçonnée. L’occasion d’apprendre à croiser les couches de peinture, poncer entre les couches, pourchasser les coulures, nettoyer soigneusement les pinceaux… Grand seigneur, la grande a accepté d’embarquer la cadette dans l’aventure.
Et les réjouissances peuvent durer jusqu’au crépuscule (le temps pour moi de terminer de tapisser mon fauteuil à grosses bouches).
Après séchage, ne restait plus qu’à choisir le tapis. C’est au grenier que se cachait la merveille : un catalogue d’échantillons de velours d’ameublement.
Ce n’est qu’un début, il faut décorer désormais : il faut des franges pour le tapis, un lustre à pampilles est en préparation, des revues miniature pour laisser traîner négligemment à côté du canapé, des miroirs pour égayer les murs, des coussins en veux-tu en voilà… et pourquoi pas un kitschissime tigre en résine pour dépoussiérer cet intérieur à la miss Marple avec un zeste d’excentricité toute britannique ?
Bref, le jeu ne fait que commencer et ma fille a des envies très simples pour Noël : des caisses en bois ! Avide de tranquillité, je lui ai suggéré de décorer le plafond à la manière des « grotesques » : volutes et rosaces colorées, ça devrait l’occuper un bon moment ! A l’heure qu’il est, ce salon en devenir est déjà colonisé par les playmobil : sacrilège, un barbecue en plastique plus-laid-tu-meurs trône à côté du canapé !
Avec une maman comme toi, pas étonnant que cette enfant ait tant d’imagination et de goût. C’est très réussi, bravo !
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Superbe ! Quel souci du détail, je suis admirative !
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Je trouve que cette demoiselle a hérité du bon goût et de la créativité de sa chère maman. Bonheur double, de la voir si douée et de la voir si bien occupée!
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Je parie que les tabliers des demoiselles sont faits main…
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Raté ! Chinés chez Emmaüs (sinon j’aurais eu du mal à les sacrifier à la peinture !).
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Bonjour,
Super activité, et la jeune fille est très douée ! La peinture du parquet est magnifique.
Mais si je peux me permettre, je trouve ces mots pas très sympas pour les enfants : « pour les parents qui veulent avoir la paix… le temps pour moi de tapisser mon fauteuil… avide de tranquillité, je lui ai suggéré… ça devrait l’occuper un bon moment… »
J’ai eu 4 enfants et je comprends ce que vous voulez dire, mais bon, on les a faits, c’est à nous d’assumer notre vie avec eux, et de censurer (surtout sur les blogs) nos commentaires à leur propos.
Amicalement,
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Oh pitié, je m’en veux déjà suffisamment que mon blog soit si peu mordant : une telle vitrine de mièvrerie et de bons sentiments que je me demande avec effarement, à mes rares heures de lucidité, comment je peux me complaire dans un tel étalage de joliesse et de mignonneries plus sucrées tu meurs. Laissez-moi au moins faire entendre une note un peu dissonante dans cette ode à la bonne humeur familiale ! Et, si mère courage que je sois, je ne raterai pas une occasion de dire à mes filles quand elles me pompent l’air. Et s’il est une chose dont je suis sûre, c’est quelles ne douteront jamais pour autant de l’amour que je leur porte, ces sales gamines !
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Wahou… C’est superbement magnifique !!!
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Bonjour,
Ma fille a le même goût pour les décors miniatures. Pour l’instant ils sont en carton. Ou en plastique Leg*.
Elle me pique mes bouts de tissus pour faire des canapés et autres coussins.
Mais la patience que développe votre fille est admirable.
Je vais montrer tout ça à la petite pour lui donner des idées.
Bizz
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Oui, du mordant et de la dissonance, que diantre !!!
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Tu as tellement de petits trésors chez toi pour stimuler leur créativité, et tu es un tel modèle pour elles! A condition de les lâcher en effet afin qu’elles soient libres d’imaginer à leur façon. Personnellement je te décerne la palme éducative de la blogosphère. Ici, les enfants ne sont pas une jolie vitrine à montrer, mais on sent une exigence éducative devenue rare où l’imagination, la lecture, la création remplacent le matérialisme, la soif de posséder qui dominent ailleurs.
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c’est superbe ! telle mère telles filles ! elles ont de la chance que tu les entraines sur ce chemin de créativité ! et oui mes enfants me pompent aussi l’air et j’ai besoin de tmeps sans eux régulièrement aussi !
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